samedi 13 octobre 2007

TRESORS PHOTOGRAPHIQUES DE LA SOCIETE DE GEOGRAPHIE

L'exploration, c'est à dire la découverte de nouveaux territoires et l’étude de cultures inconnues, nous fait l’effet aujourd’hui d’un privilège du passé, et les destins des grands explorateurs nous font rêver. C’est pourquoi les daguerréotypes et les calotypes de l’exposition Trésors photographiques de la Société de Géographie, nous transportent de bonheur et de nostalgie à la fois. Au XIX siècle, la photographie naissante offrait pour la première fois le moyen d‘imprimer la réalité des choses tel que l‘oeil la perçoit. C’est en effet selon le même procédé de sensibilité à la lumière que l’image s’imprime sur la rétine de notre oeil et sur la plaque de verre, c’est pourquoi l’illusion est si parfaite. Ces qualités de fidélité de représentation suscitèrent immédiatement un engouement grandissant pour la photographie, qui ne devait jamais être démenti. En outre, ce nouveau moyen de créer des images ne réclamait pas un don particulier comme le dessin ou la peinture, il s’agissait d’une technique accessible à tous, pourvu que l’on soit disposé à trimballer avec soi la chambre noire, et tout son attirail de plaques et de produits chimiques. Une technique certes plus encombrante qu’un crayon et un bloc à dessin, mais aussi plus rapide, et permettant de reproduire chaque image à l’infini, alors qu’une gravure ne permet qu’un trentaine d’épreuve de bonne qualité. Pour toutes ces raisons, le document photographique devint le complément naturel du témoignage écrit, et le travail de l‘explorateur devait désormais inclure l’élaboration d’une sorte d’inventaire en images des merveilles du monde. On peut ainsi voir, en parcourant l’exposition de la Bibliothèque Nationale, un inventaire des curiosités géologiques : comme des canyons, des volcans ou des roches erratiques; des curiosités ethnologiques : comme des canaques vêtus du traditionnel étui pénien, des somaliennes transportant l’eau dans des calebasses; ou encore des curiosités techniques : comme la construction du pont de Forth Bridge en Ecosse, plus grand chantier métallique de l’époque avec la tour Eiffel. On peut aussi voir les derniers souvenirs de mondes déjà presque entièrement disparus, comme celui des samouraïs ou des indiens d’Amérique, dans le même temps que renaissaient, grâce à l’archéologie, des civilisations depuis longtemps ensevelies, comme celle de l’Egypte ancienne, ou bien celle du bouddhisme javanais, nettoyée de sa gangue de végétation séculaire à Borobudur. Que ce soit sur un plan humain, archéologique, géographique ou technique, c’est un monde en pleine mutation que nous donne à voir ces clichés d’il y a un peu plus d’un siècle, à peine, où tout pourtant nous paraît déjà si lointain. Les auteurs des premières photographies du monde les prenaient pour eux-mêmes, pour satisfaire la curiosité de leurs contemporains, et parce qu’ils étaient conscients de la valeur documentaire qu’elles auraient pour les générations à venir, mais je doute qu’ils aient pu soupçonner à quel point elles seraient pour nous porteuses de rêves...

samedi 6 octobre 2007

VOYAGE PLACE SAINT-SULPICE

Il suffit de faire le tour de la place Saint-sulpice à Paris pour faire un tour du monde presque complet, avec l'avantage de s'épargner l'inconfort des voyages. Les Maisons des Amériques Latines, des Indes et de l'Afrique se chargent de ce prodige en nous présentant chacune une exposition de photos thématiques. L'exposition sans doute la plus spectaculaire est celle que présente la Maison des Amériques Latines et des États-Unis sous le titre D'un pôle à l'autre, réunissant les deux Amériques dans un espace géographique allant de l’Arctique à l’Antarctique, et montrant une fois de plus que les extrêmes se rejoignent, puisque ces deux pôles se ressemblent comme deux gouttes d’eau, ou plutôt deux blocs de glace. Les photos de Remy Marion nous donnent à voir en effet des paysages d’une blancheur immaculée, parsemés de sculptures de glaces, et habités seulement par quelques ours, blancs eux aussi, des manchots, des morses et des oiseaux pêcheurs. La beauté de ces images tient indéniablement à la notion de pureté qu’elle nous transmet, d’un monde propre, limpide, non souillé, en apparence du moins, par notre civilisation naturophage et naturocide, et qui réveille en nous la nostalgie d’un paradis perdu. Cette impression est renforcée par l’horizon infini qu’offrent à notre regard ces vastes étendues lumineuses, nous faisant rêver à une liberté absolue. C’est que le désert de glace, contrairement au désert de sable, ne nous semble pas inhospitalier, il propose même une image rassurante sous bien des aspects. Tout d’abord sa blancheur, symbole de pureté, nous met inconsciemment en confiance, cette matière translucide ne semble pas pouvoir mentir ou abriter en son sein quelque danger sournois. Ensuite cette matière saine et fraîche évoque pour nous la vie, puisqu’elle est essentiellement constituée d’eau, comme nous. Enfin la présence de mammifères heureux et largement nourris par la mer, menant une vie ludique de glissades et de plongeons, nous permet de nous identifier à ces animaux, et de rêver à leur vie simple et joyeuse. La seule difficulté contre laquelle il nous faudrait nous prémunir si devions y vivre est le froid, et pour cela les animaux une fois encore nous montre la voie, il suffit de revêtir une belle peau de phoque, ou une belle robe d’ours pour être à l‘abri du froid. La vie polaire devient ainsi possible, légère et aisée. Après cette aventure rafraîchissante, vous pouvez vous rendre à la Maison de l’Afrique, où tout n’est que chaleur, couleur et décoration dans la poussière sèche des villages africains. Le contraste est saisissant, une population dense, des tissus aux couleurs vives et multiples, représentants toutes sortes de motifs géométriques, que l’on retrouve peints sur des malles, des théières, des bassines, etc. Une vie sociale foisonnante et voyante s‘oppose à la menace d’une sècheresse omniprésente. Pour finir, vous n’avez qu’à faire trois pas pour vous rendre à la Maison des Indes, où des photographies de l’Inde des Maharadjas vous transporteront dans un monde surréaliste et raffiné où les tilburys sont tirés par des antilopes, et où l’extravagance des palais rivalise avec celle des costumes et des bijoux portés par les princes. Et parce que l’art de vivre indien n‘est pas disparu, on vous offrira une délicieuse tasse thé à la cannelle.